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Litterature Poésie

L’âge radical

Cet âge radical où les enfants changent de visage me parle d’un vent qui passe sur les contours,
Sur les joues qui maigrissent, les regards qui s’assument – l’enfance s’assoupissant –
(Respir)
Un lever de soleil, les ruines désaboutées de nos jeux inconscients,
Les mâchoires grandes ouvertes pour rire des rires que l’enfance a connu mais ne reconnaît plus,
(Aspire)
L’air qui coule entre ma gorge et mes poumons.
(Ce fut un regard qui a poussé la plume)


Une paire d’yeux, se souvenir que la carcasse a oublié, forte des douleurs portées – fortes de toutes celles décalées par l’esprit qui se cache dans les rêves.

Une piste de neige pour glisser sans retour, les bois sont riches d’histoires à faire baisser les paupières,


Ce fut un regard qui a porté la plume – la silhouette d’une femme-fille, sa sœur et leurs cheveux de feu, les mains qui se frôlent, la montagne sans plus d’oiseaux dans le ciel, des crêtes pour pleurer, des vagues pour se noyer, des plages pour s’assoir – respirer – une fresque peinte avec le sang des femmes qui grandissent dans le noir – il a fallut laisser la plume courir ici sur la page)
Sur les rues, dans les rues, au-delà des rues : des âmes. Je me suis rendue compte du vide entre les pas, de la mesure battue par la foule qui ne se regarde pas,
J’ai remarqué, arrêtée tout au milieu de monde, comprendre qu’il faut marcher longtemps dans la rue pour remarquer les corps.
(Fantômes)
La Plaine se remplit de celleux qui ne veulent plus mourir à l’intérieur, des passages, des poèmes, des crachats balancés comme on balance les chaînes qui tiennent immobiles toustes les impuissant.es – il avait fallut marcher pour comprendre le mouvement de nos baskets sur l’asphalte, la vigueur de celleux qui chassent le soleil à toutes les heures. Je vois des flashs lumineux dans la nuit, des stroboscopes pour les épileptiques, mes poils hérissés, mes cuisses veinées à vergetures, mes mains ne sont pas gantées, mon corps s’habille d’un long manteau de laine,
Juste-là, un homme me parle,
Je ne lui réponds pas.
(Échardes)
Faut-il parler à tout le monde ?
Faut-il remarquer les visages qui sortent de l’enfance ?
Iels se craquent – se poussent, hirsutes, l’enfance n’a pas de trajectoire droite mais des courbes éparses dans sillons des collines que sont mes fesses et mon sexe,
(Les nôtres) Invisibles corps grandis,
En dessous du sapin des présents pour les enfants gentils,
Des poupées pour les garçons des camions pour les filles, et les autres ? des pas dans le sable dessinent l’aurore qui s’éteint, un chemin pour brasser de l’air, pour affirmer sans bruit la vie qui s’anime dans le ventre bru

lant des enfants qui n’en sont déjà plus –
Je vois la condescendance des adultes criant des chants patriotiques – je ferme les yeux un instant – il n’y a plus rien que des corps aux contours de ferraille et velours sur les doigts cliquetant, une histoire de constellation décousue, une histoire d’adulte déguisée, les sœurs aux visages semblables qui changent pour passer d’un âge à un autre, les yeux globuleux d’un homme un peu trop vieux qui les mate en se demandant s’il pourrait les baiser –


Ma langue se fourche aux mots du sexe sale dans les yeux de l’homme vieux. Lui n’a pas de visage il a perdu ses peines, il a soufflé l’espoir tout en haut des montagnes, il s’est perdu en lui-même – la paix n’existe plus, leur quotidien a malpenser les enfants qui ne sont bientôt plus des enfants.
Il s’agit bien là de l’âge radical où les enfants changent de visage, de corps, d’esprit, mon âge entre ses mots bel et bien disparu.

A.P

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