Jusqu’à il y a peu de temps, je pensais – j’étais même persuadée- d’être une exception au sein de la gent féminine de ce monde. Quelle vantardise de ma part. Avoir été réaliste aurait été un gain de temps significatif dans ma quête de vérité permanente.
Alors que je me complaisais dans mon rôle de fille libérée, aux conquêtes multiples, débarrassée du carcan de la fille bien dans le fond et dans la forme, j’offrais mon corps au plus offrant et parfois même à celui qui cherchait le meilleur deal. Exprimer mon ouverture sexuelle en ces termes ne donne j’espère pas l’impression d’un quelconque regret. Au contraire, je suis heureuse de vivre ma vie de cette façon. Cependant, je me disais que lorsque il s’agirait d’aller un peu plus loin que l’éternel au revoir devant la porte à moitié ouverte, les yeux encore endormis de la nuit passée, je serai différente. Que nenni l’ami, je suis comme les autres et voire peut-être pire.
Le fait d’avoir pris l’habitude de ces micro-relations à la durée plus ou moins déterminée, variant entre sept et vingt-quatre heures m’a propulsée dans une sphère de la projection amoureuse aux proportions absurdes. En effet, dès lors que le temps passé avec le dernier partenaire sexuel en date dépasse la date de péremption gérée avec subtilité dans les cas échéants, je perds mes moyen et la confusion m’emporte. Car oui, malgré la quantité de baise accumulée, cela ne m’empêche aucunement de confondre désir et sentiments, qui sont même s’ils s’entendent à merveille, deux entités complètement différentes. En fait, l’idée c’est qu’en fonction de l’alchimie agissante entre mon poto du soir et moi-même, la donne change pas mal. Si c’est pas mal mais que bon, deux-trois détails m’ennuient un tant soit peu, et avant même que monsieur ou madame aie passé la porte de mon domicile, le choix est déjà fait dans ma tête, je ne les reverrai pas. Cette description de la situation, aussi cruelle et superficielle soit-elle, est la réalité, ma réalité, qui me convient parfaitement tant que c’est moi qui prend la décision. Encore faut-il qu’il y ait véritablement une décision à prendre… car dans la plupart des cas, les deux parties sont conscientes que ce petit jeu ne durera pas au-delà du claquement de la porte d’entrée. C’est un peu le schéma s’il vous plaît merci au revoir, dans sa structure la plus simple. Si l’on ne rajoute aucune inconnue à cette équation alors ce modèle peut être reproduit à l’infini sans le moindre couac. Malheureusement la réalité n’est pas exactement si rose.
Il suffit d’une fois, d’une toute petite étincelle en plus et tout l’édifice s’effondre. Notre petit cerveau d’être humain se retrouve chamboulé, perturbé, bouleversé. Ces trois termes sont d’ailleurs souvent utilisés dans les récits de coups de foudre, ou encore quand un amoureux transi décrit la toute récente passion qui enflamme ses entrailles. Alors parfois cette braise se transforme en feu ardent et brille pendant longtemps, au grand bonheur des intéressés. Mais ça c’est quand l’histoire finit bien et ce n’est pas dont je veux parler ici. Je préfère écrire sur le moment où l’on réalise que la lueur qu’on pensait apercevoir n’est finalement que celle d’une pauvre lampe qu’Ikea dont la rapide pression sur l’interrupteur suffit pour l’éteindre à jamais. Ce constat-là, le fait qu’on se rende compte que l’autre a tué l’embryon de feu qu’on voulait faire naître, il est douloureux, et il est surtout universel. Qu’on connaisse les joies de l’amour où qu’on les découvre à peine, rare sont ceux qui restent indifférents à cette situation. Mais n’oublions pas que les hommes préhistoriques n’ont pas découvert le feu en un jour, alors pourquoi ne pas prendre notre temps ?
Dit comme ça, ça peut paraître logique, malheureusement la raison humaine ne nous permet pas de rationaliser nos émotions instinctivement. Même lorsque l’on a prit préalablement la décision de se protéger des sentiments et tout le tralala que j’ai moi-même adopté pendant longtemps (et je continuerai sûrement), nous ne sommes pas ignifugés à la chaleur du love.
Ce fameux love renferme par ailleurs des dimensions qui sont différentes pour chacun, sa définition est loin d’être universelle, régie par les mêmes règles structurelles. C’est même souvent l’inverse et c’est ce qui nous plonge dans des quiproquos sans fin, à l’origine de milliards de migraines dans nos cerveaux tourmentés, les hormones en délire et le cœur agité. Cette vulnérabilité je la découvre aujourd’hui comme une force, et plus comme une faiblesse qui allait forcément me mener vers le précipice des désespérés de l’amour. Ils nous nourrissent, nous mettent en colère et nous font aimer cette sensation absurde dans nos ventres, qu’on prendrait à l’habitude pour une nausée inconvenante.
Certains choisissent de s’en servir, de la partager avec une ou plusieurs personnes, d’autres de l’enfermer dans une boîte hermétique jusqu’à l’oublier, moi mon amour, je l’aime charnel et à domicile.
Je suis une salope amoureuse de l’amour et j’en suis fière. Personne ne devrait avoir honte de sa sexualité ni laisser la société s’en servir pour nous définir à travers des démarches comme le slut-shaming par exemple. Le nombre de nos conquêtes ne fait pas de nous des collectionneurs, juste des êtres humains, qui font des trucs avec d’autres êtres humains, comme d’autres iraient jouer aux échecs avec leur voisin, et ça, ça ne regarde personne.
Pour en savoir plus sur le slut-shaming, c’est par ici.
Une réponse sur « Life as slut – Récit précaire extrêmement subjectif »
[…] parler de ça naturellement avec une autre femme. Il y a deux ans j’avais déjà écrit un article sur PEACH pour aborder la question de la saloperie autoproclamée : c’est comme dire je suis […]
J’aimeJ’aime